La Vénus de Milo est considérée comme un chef d’œuvre de l’art grec. Toutefois, au grand dam des autorités helléniques qui en demandent la restitution, elle appartient depuis 1821 aux collections publiques françaises. Plus généralement, on admettra volontiers qu’elle est européenne et occidentale. Et cela va sans dire, sa beauté est universelle. Mais peut-elle être japonaise ? À travers l’examen de la réception de la Vénus de Milo au Japon, il s’agira de réfléchir aux conditions d’une appropriation utopique des œuvres d’art plastiques, étant entendu que, contrairement aux textes qui peuvent être cités, tronqués, réédités, tableaux et statues sont puissamment assujettis à leur matérialité. À rebours des discours actuels sur la dématérialisation des œuvres, qui va de pair avec une fétichisation croissante des originaux, cet article explore le chemin d’une incorporation par l’usage et le refaire.